Situation de quasi‑usufruit : avantages et inconvénients

La transmission de patrimoine constitue un enjeu majeur pour de nombreuses familles soucieuses d’optimiser la répartition de leurs biens dans un cadre juridique et fiscal sécurisé. Parmi les instruments juridiques utilisés en droit patrimonial, la notion de quasi-usufruit occupe une place singulière. Fréquemment employé dans le cadre d’une succession, le quasi-usufruit est une modalité d’usufruit portant sur des biens dits consomptibles, au premier rang desquels figurent les sommes d’argent.

Cadre et définitions de la situation de quasi-usufruit

Situation de quasi usufruit avantages et inconvénients

Avant d’aborder ses avantages et inconvénients, il convient de revenir sur certaines définitions : 

L’usufruit, défini par l’article 578 du Code civil, confère à son titulaire le droit d’user d’un bien et d’en percevoir les fruits, sans en disposer. 

Le quasi-usufruit, quant à lui, s’applique aux biens qui, par nature, ne peuvent être utilisés sans être consommés (argent, titres, denrées, etc.). L’article 587 du Code civil dispose que dans ce cas, l’usufruitier a le droit de s’en servir à charge d’en rendre la valeur à la fin de l’usufruit. Il ne s’agit donc pas de restituer les biens en nature, mais leur équivalent en valeur.

Cette notion quasi-usufruit recouvre deux régimes juridiques : le quasi-usufruit légal et le quasi-usufruit conventionnel.

Les différentes formes de quasi-usufruit

Le quasi-usufruit légal : conséquence du démembrement de la succession

En vertu de la loi, le conjoint survivant peut, en application de l’article 757 du Code civil, opter pour l’usufruit de la totalité des biens de la succession. Si celle-ci comprend des actifs financiers, le quasi-usufruit s’applique de plein droit sur ces sommes d’argent, sauf volonté contraire exprimée par les parties. Ce quasi-usufruit est dit « légal » car il résulte directement de la loi.

Dans ce cas, le nu-propriétaire (souvent un enfant héritier) devient créancier de l’usufruitier pour la valeur des sommes reçues. Toutefois, à défaut d’établissement d’une convention de quasi-usufruit, la preuve de la dette devient complexe, avec un risque de contentieux ou de taxation supplémentaire. Ainsi, même dans le cadre d’un quasi-usufruit légal, il est vivement conseillé d’être accompagné par un notaire pour formaliser les engagements.

Le quasi-usufruit conventionnel : outil d’organisation patrimoniale

Le quasi-usufruit peut également résulter d’un accord explicite entre les parties, dans un cadre hors succession : clause bénéficiaire d’assurance vie démembrée, ou disposition testamentaire. Cette liste n’est pas exhaustive car le quasi usufruit peut également résulter d’une vente d’un bien en démembrement par exemple. Il est alors qualifié de conventionnel. Dans cette configuration, le quasi-usufruitier peut jouir librement des sommes transmises, mais s’engage à restituer leur valeur à l’extinction de son droit.

L’intérêt de cette mécanique réside dans sa souplesse : les parties peuvent prévoir des garanties (hypothèque, caution, inscription de privilège) pour protéger les droits du nu-propriétaire. Il est fréquent que le notaire dresse alors une convention de quasi-usufruit mentionnant la dette de restitution, ce qui facilitera le calcul fiscal lors du décès de l’usufruitier.

Les avantages du quasi-usufruit

Maintien du niveau de vie du conjoint survivant

Le principal avantage du quasi-usufruit est d’ordre patrimonial : il permet au conjoint survivant de disposer librement des liquidités de la succession (ou issues d’un contrat d’assurance vie), tout en assurant aux enfants une créance de restitution à terme. Le maintien du niveau de vie du conjoint survivant s’en trouve préservé, ce qui est fréquemment recherché dans les familles recomposées ou lorsque l’un des époux n’a pas de revenus propres.

Avantages fiscaux et neutralité temporaire

Sur le plan fiscal, le quasi-usufruit permet de bénéficier d’une neutralité temporaire : lors du décès de l’usufruitier, les nu-propriétaires deviennent pleins propriétaires sans taxation supplémentaire. En effet, si la dette de restitution est dûment mentionnée, elle vient en déduction de l’actif successoral, réduisant ainsi la base imposable au regard des droits de succession (article 774 bis du Code général des impôts).

Outil de stratégie patrimoniale

En matière de stratégie patrimoniale, le quasi-usufruit est un outil de planification successorale permettant de concilier souplesse et protection. Il offre également un moyen de préserver la cohésion familiale en évitant l’indivision sur les liquidités (sauf cas de plusieurs nus-propriétaires), tout en garantissant les droits futurs des héritiers.

Les inconvénients et risques du quasi-usufruit

Risque d’absence de preuve de la dette

Le quasi-usufruit comporte également des inconvénients. Le principal risque concerne l’absence de formalisation de la dette de restitution. Sans reconnaissance explicite (acte notarié ou écrit privé), l’administration fiscale peut considérer que les fonds ont été définitivement transmis à l’usufruitier, ce qui entraîne une double imposition lors de la dévolution aux nus-propriétaires.

Risque d’insolvabilité de l’usufruitier

En l’absence de garanties, les nus-propriétaires sont exposés à un risque d’insolvabilité de l’usufruitier au moment de la restitution. Une gestion imprudente ou un décès anticipé peuvent compromettre l’effectivité du droit de créance. Enfin, des conflits familiaux peuvent émerger si les modalités de gestion ou de restitution n’ont pas été anticipées, renforçant l’importance du rôle du notaire dans l’encadrement de l’opération.

Exemple concret en succession

Imaginons un couple marié sans contrat avec des enfants communs. À son décès, le conjoint survivant opte pour l’usufruit de l’actif successoral, notamment sur un compte bancaire de 100 000 €. Celui-ci devient quasi‑usufruitier et peut disposer de la somme. En présence de convention, ses enfants deviennent créanciers d’une dette de restitution de 100 000 € à son décès.

L’article 774 bis du Code général des impôts autorise la déduction de cette créance de l’actif successoral, évitant sa taxation. Si par la suite une convention précise cette créance, les héritiers peuvent récupérer les fonds sans droits supplémentaires.

Le rôle du notaire dans la mise en place d’un quasi-usufruit

Compte tenu de la technicité de ce mécanisme et des enjeux financiers qu’il recouvre, l’accompagnement d’un notaire est essentiel. Ce dernier évalue les conséquences juridiques et fiscales du quasi-usufruit dans le cadre global de la transmission patrimoniale. Il rédige les actes nécessaires (convention, reconnaissance de dette, inscription de garantie) et veille à la sécurisation des droits des parties.

Le notaire intervient également lors du décès de l’usufruitier pour :  

Afin d’optimiser les abattements, exonérations et éviter toute double imposition.

Conclusion

Le quasi-usufruit est un outil juridique de grande portée pour organiser une transmission patrimoniale efficace. Il permet une gestion souple des liquidités et assure une protection du conjoint survivant, tout en garantissant aux héritiers une récupération future. Toutefois, il nécessite une rigueur juridique et fiscale absolue pour éviter les dérives ou contentieux. Le recours au notaire est donc non seulement utile, mais essentiel pour sécuriser les opérations et protéger les intérêts de l’ensemble des parties.

Questions fréquentes

Le quasi-usufruit est-il automatiquement prévu dans une succession ?

Oui, lorsqu’un conjoint opte pour l’usufruit sur la succession, les liquidités (ex. : comptes bancaires) sont automatiquement soumises au quasi-usufruit, sauf stipulation contraire. Il s’agit alors d’un quasi-usufruit légal, prévu à l’article 757 du Code civil.

Faut-il rédiger une convention de quasi-usufruit ?

C’est fortement recommandé. Même dans le cas d’un quasi-usufruit légal, une convention ou une reconnaissance de dette permet de prouver l’existence d’une créance en faveur des nus-propriétaires. Cette preuve est indispensable pour éviter une double imposition lors du décès de l’usufruitier.

Quels sont les risques pour les héritiers en l’absence de convention de quasi-usufruit ?

Sans convention, il devient difficile de prouver l’existence d’une dette de restitution. Les héritiers risquent alors de payer des droits de succession sur les mêmes sommes, une première fois lors du décès du défunt, puis une seconde fois lors du décès de l’usufruitier.

Peut-on garantir la créance de restitution dans un quasi-usufruit ?

Oui. Dans le cadre d’un quasi-usufruit conventionnel, il est possible de mettre en place des garanties (hypothèque, caution, inscription de privilège) pour protéger le nu-propriétaire contre l’insolvabilité éventuelle de l’usufruitier. 

Quel est le rôle du notaire dans le quasi-usufruit ?

Le notaire joue un rôle central : il conseille, rédige les actes (convention, reconnaissance de dette), assure la sécurité juridique de l’opération et accompagne la liquidation de la créance au décès de l’usufruitier. Il permet également d’optimiser les conséquences fiscales.

Prendre contact avec un notaire

    (max 5 Mo par fichier).